BONNEAU (Dne Henri)
Châteauneuf-du-Pape
Marcel Bonneau
Vallée du Rhône
Le producteur
S’il y a une figure légendaire sur Châteauneuf-du-Pape, c’est bien celle d’ Henri Bonneau. Et il s’agit bien de légende, car l’homme se cachant, les vins s’arrachant à prix d’or dans les salles des ventes, on se prête à toutes les conjectures, à tous les fantasmes…
Alors oui il y a de la magie qui se mêle au réel, il y a du romanesque, mais aussi parce qu’il y a des senteurs d’antan, des racines profondes qui retiennent cet homme et ses vins dans un univers disparu. Ce n’est pas qu’Henri Bonneau soit passéiste, il est tel qu’il est, simplement, mais sa vie frugale, sobre et heureuse le maintient dans un monde au temps suspendu.
On arrive donc chez lui par une petite porte, avec une sonnette…et un petit carton, indiquant “cave fermée”. La maison est discrète, de la cave on ne voit rien, pas même un soupirail. Le monsieur vient vous ouvrir avec gentillesse, sans protocole, la mise simple d’un vieil homme du sud.
Et nous voici en train de descendre dans des pièces insoupçonnées. Il se cache après cette entrée, en contrebas, un petit labyrinthe formé de minuscules pièces aveugles. Dans l’une d’elles, quelques cuves acier contiennent la dernière récolte en cours de fermentation, puis dans les alcôves suivantes, tout juste éclairées d’une vague ampoule d’où la lumière filtre à travers un abat-jour de toiles d’araignées, on découvre des amoncellements de barriques de tailles et d’âges multiples. Tout est à l’unisson du sol et des murs, empreint d’une douce humidité et recouvert de l’habit du temps, camaïeu de bruns et de rouges sombres, pas une brillance, pas la trace d’un inox, tout juste le reflet de la lampe sur la pipette qui plonge dans la barrique, sur nos verres impatients et sur les yeux malins et heureux du petit garçon septuagénaire qui nous offre cette visite.
Il est heureux, vainqueur éclatant contre l’oenologie moderne qu’il met au tapis de son regard et de ses vins qu’enfin nous dégustons. Quoi de plus magique que de sentir cette pureté, cet éclat, cette évidence dans ce vin, au milieu de cette antre insalubre, vétuste, humide. Les diamants les plus purs ne proviennent-ils pas des minerais les plus sombres ?
Et puis il y a cette magie du temps, cette magie de l’homme qui goûte un vin en barrique depuis 6 ans, et qui dit “non ce n’est pas prêt, il faut attendre encore”. Ainsi la cuvée spéciale 98 n’était pas encore en bouteille en 2006… Cette suspension du clepsydre nous infuse, quand, passant d’une grotte à l’autre, nous voyons, marqués à la craie sur les fûts, les millésimes en élevage, on pourrait dire en affinage. Au-delà du caractère influé par le millésime, il ressort à la dégustation que plus les vins avancent en âge, plus ils gagnent en finesse, plus la marque du bois s’efface. Dans cette magie du tout-à-rebours, nous pourrions égrener mille aspects techniques, comme l’absence de soufre ou de contrôle des températures, mais ces détails sont anecdotiques face à la réalité, à l’évidence qui surgit du vin.
Et comme dans toute expérience mystique, quand on sort de la grotte il nous faut tout interroger, car la mémoire de son vin nous rappellera toujours à l’ordre.
Depuis 2001 il a aussi repris un domaine sur le Gard, dont est issu le vin Les Rouliers. Afin de pouvoir vinifier à son aise, assembler les millésimes s’il le souhaite, et pour se passer de l’administration qu’il exécre, Henri Bonneau passe systématiquement ce vin en Vin de Table. C’est un vin plus simple que ceux de Châteauneuf, mais très proche dans l’esprit, avec les même méthodes à la vigne et au chai. Une belle introduction à son travail.
Henri Bonneau s’est éteint le 21 mars 2016 à l’âge de 78 ans.
fiche technique du domaine :
superficie : 6 hectares – 85% de grenache / 15% autres cépages
rendements faibles – fermentations sur levures indigènes, fermentations très longues selon les millésimes (il arrive qu’elles s’étalent sur près d’une année)
élevage entre 5 et 7 ans selon le millésime et la cuvée.
Les cuvées ne sont pas des cuvées parcellaires mais des cuvées correspondant à un niveau qualitatif du vin. Selon les années Henri Bonneau produira ou ne produira pas certaines.
Il en existe trois :
Chateauneuf-du-Pape
Marie Beurrier
Réserve des Célestins
Les vins du domaine ne sont plus proposés en ligne. Pour toute demande veuillez nous adresser un email ou nous contacter par téléphone.